Jacqueline tenait un institut de beauté. La dépression l’a submergée, jusqu’à la crise de délire. Il y a aussi Jules, Annette ou Marguerite. Tous sont dans l’urgence d’exprimer leur souffrance. En mettant en scène des textes écrits par des personnes internées, Olivier Martin-Salvan ouvre un chemin dans les labyrinthes de la psyché humaine. Ces écrits d’art brut révèlent une langue hallucinée et poétique, portée par un acteur prodigieux.

Donner chair et voix au chaos des textes produits par les patients d’institutions psychiatriques. Des auteurs inconnus, oubliés de la littérature, qui inventent pourtant leur propre langue et offrent une matière théâtrale inouïe : puissance sauvage des phrases, étrangeté du rapport au monde, acuité existentielle rare… Entre trop-plein émotionnel et impasses mentales, ces paroles d’exclus sont un choc. Pour figurer ces consciences enfermées, une cage métallique trône au milieu de la scène. Derrière les barreaux, un musicien, Philippe Foch, qui remonte à contre-courant le torrent des mots, dans un affrontement sonore brut. Autour de la cage, Olivier Martin-Salvan évolue dans une superposition de robes dont il enlève les couches au fur et à mesure, créant un amoncellement sculptural et multicolore. Son talent à transmettre l’indicible est troublant, autant que l’inventivité et la profondeur de ces écrits qui restituent aussi une part de nous-mêmes.